- EAN13
- 9782072977503
- Éditeur
- Gallimard
- Date de publication
- 09/2022
- Collection
- Folio
- Langue
- français
- Langue d'origine
- français
- Fiches UNIMARC
- S'identifier
Autre version disponible
-
Papier - Folio 8,10
' Il y avait l’odeur des brochettes, les gars des tables Coca-Cola qui la
sifflaient : t’es belle petite, le bruit sur le terrain d’en face avec les
chants du Raja, l’équipe de foot de Casa ; il y avait le vent frais de
janvier, le tintement des canettes qui s’entrechoquaient, les insultes, les
crachats ; et il y avait Driss, là, sur le côté. Elle le voyait, géant sur ses
jambes courtes, une main tranquille sur l’épaule du flic, et l’autre fouillant
sa poche pour lui glisser un petit billet de cent, sa bouche lançant quelques
blagues entendues, un clin d’œil de temps en temps ; et le flic en face
souriait, attrapait le billet, donnait à Driss une tape dans le dos, allez,
prends une merguez, Sidi, ça me fait plaisir. Driss, le géant au milieu des
pauvres, Driss le géant qu’elle venait d’embrasser, pensait Sarah ; avec son
fric, il n’y aurait plus jamais de flic, plus jamais de lois — ce serait eux
deux, la loi. ' Années 1990, Casablanca. Sarah n’a rien et à la sortie du
lycée, elle rencontre Driss, qui a tout ; elle décide de le séduire, elle veut
l’épouser. Sa course vers lui, c’est un chemin à travers Casa et ses tensions
: les riches qui prennent toute la place, les joints fumés au bord de leurs
piscines, les prostituées qui avortent dans des arrière-boutiques, les
murmures faussement scandalisés, les petites bonnes harcelées, et l’envie
d’aller ailleurs. Mais ailleurs, c’est loin.
sifflaient : t’es belle petite, le bruit sur le terrain d’en face avec les
chants du Raja, l’équipe de foot de Casa ; il y avait le vent frais de
janvier, le tintement des canettes qui s’entrechoquaient, les insultes, les
crachats ; et il y avait Driss, là, sur le côté. Elle le voyait, géant sur ses
jambes courtes, une main tranquille sur l’épaule du flic, et l’autre fouillant
sa poche pour lui glisser un petit billet de cent, sa bouche lançant quelques
blagues entendues, un clin d’œil de temps en temps ; et le flic en face
souriait, attrapait le billet, donnait à Driss une tape dans le dos, allez,
prends une merguez, Sidi, ça me fait plaisir. Driss, le géant au milieu des
pauvres, Driss le géant qu’elle venait d’embrasser, pensait Sarah ; avec son
fric, il n’y aurait plus jamais de flic, plus jamais de lois — ce serait eux
deux, la loi. ' Années 1990, Casablanca. Sarah n’a rien et à la sortie du
lycée, elle rencontre Driss, qui a tout ; elle décide de le séduire, elle veut
l’épouser. Sa course vers lui, c’est un chemin à travers Casa et ses tensions
: les riches qui prennent toute la place, les joints fumés au bord de leurs
piscines, les prostituées qui avortent dans des arrière-boutiques, les
murmures faussement scandalisés, les petites bonnes harcelées, et l’envie
d’aller ailleurs. Mais ailleurs, c’est loin.
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